UTILE À SAVOIR


Ce blog est alimenté par Jacques Lefebvre-Linetzky. Commentaires et retours bienvenus.


dimanche 12 novembre 2023

LE NOIR EST LUMIÈRE

Celui qui médite vit dans l'obscurité ; celui qui ne médite pas vit dans l'aveuglement. Nous n'avons que le choix du noir. 

Victor Hugo



Kasimir Malevitch (1879-1935) Carré noir, 1923-1930
Huile sur plâtre, 36,7 x 36,7 cm, 
Image empruntée ici

Black is beautiful

Black is Black, I want my baby back chantait le groupe Los Bravos en 1967 et Claude Nougaro célébrait le sourire éclatant de Louis Armstrong dans Armstrong, je ne suis pas noir. Je suis blanc de peauNino Ferrer s'échappait de son image d'amuseur en affirmant qu'il voulait être noir.


Louis Armstrong (1901-1971)
Image empruntée ici





Angela Davis (1944)
© Pinterest 
Image empruntée ici

En ce temps-là, à la fin des années soixante, le monde découvrait que l'on pouvait être fier d'être noir, fier d'avoir la peau noire. Les noirs relevaient la tête et tendaient le poing lors des Jeux Olympiques de Mexico en 1968. Angela Davis, faisait trembler la société américaine. Et moi, je me passionnais pour cette Amérique qui me faisait rêver.



Tommie Smith, John Carlos et Peter Norman
© John Dominis
Image empruntée ici

Pêle - mêle

Les déclinaisons du noir sont multiples  et il y aurait beaucoup à dire sur les chemises, les uniformes, les escadrons, les méchants dans les westerns, les soutanes, les manteaux, les larges chapeaux des religieux qui se balancent d'avant en arrière, les hussards de la république, les gueules noires, le trou noir à l'aube des temps, la peur du noir, les noirceurs de l'âme et le "A" de Rimbaud. 

Que dire de la mariée de François Truffaut qui était de noir vêtue, des chats noirs et de la chambre noire où le révélateur fait jaillir la lumière ? Les pensées peuvent être noires ainsi que les messes.  Enfin, pour faire bonne mesure, n'oublions pas la peste noire, également appelée la mort noire en anglais. Tout cela est inscrit à l'encre noire de nos souvenirs éteints et sans cesse ravivés.

Des silhouettes noires traversent mes nuits d'insomnie. Edith Piaf vêtue de sa petite robe noire rencontre sur scène Barbara dont l'aigle noir déploie ses ailes. La voix d'Ella Fitzgerald épouse celle de Louis Armstrong ; Sarah Vaughan, d'une élégance sensuelle, susurre Lullaby of Birdland ... Souvenirs enfouis que je ne cesse de convoquer pour faire revivre un ami disparu. 

La nuit des temps

La nuit est-elle véritablement noire ?  Le noir intense n'est jamais pur. Il abrite nos cauchemars, il nous oppresse au cœur de la nuit, il joue avec les ombres, il se joue de la lumière et des gris, il sculpte nos désirs et nos fantasmes. Et puis, au bout de la nuit, le matin blafard pèse sur les souvenirs évanouis de ces voyages d'une épaisse noirceur. 

La nuit des temps est une plongée dans un noir insondable, celui de l'avant, celui qui a précédé la lumière – le noir ne peut se passer de lumière :

Au commencement Dieu créa les cieux et la terre.

La terre était informe et vide : il y avait des ténèbres à la surface  de l'abîme, et l'esprit de Dieu se mouvait au-dessus des eaux. 

Dieu dit : Que la lumière soit ! Et la lumière fut.

Dieu vit que la lumière était bonne ; et Dieu sépara la lumière d'avec les ténèbres.

Dieu appela la lumière 'jour', et il appela les ténèbres 'nuit'.

Ainsi, il y eut un soir et il y eut un matin : ce fut le premier jour. 

La Genèse, traduction de Louis Segond. 

La nuit des temps nous plonge dans l'art pariétal. Traces laissées sur la roche des cavernes par des morceaux de charbon de bois, gravures au silex, entailles et traces colorées surgissent dans la lumière du temps présent. Le noir est lumière ; le noir fascine ; le noir est l'étoffe de nos rêves. 

Des noirs foisonnants

La peinture se met au noir durant la Renaissance italienne. Portraits, autoportraits, clairs-obscurs savamment composés, velours rehaussés de fils d'or. Le noir s'émerveille de sa propre lumière. Il suffit de se laisser emporter par la chorégraphie des ombres et des lumières du Caravage, de céder à la séduction des oeuvres du Titien, pour s'imprégner de la densité de ces noirs aux variations sans cesse recommencées. Traquez les ocres, les rouges et les bleus qui se dissimulent dans la trompeuse matière de la couleur noire. 

Le noir vibre aussi bien en Allemagne qu'aux Pays-Bas. 

C'est le noir qui nous fait percevoir toute l'acuité du regard de Dürer dans son autoportrait. Étonnante déclaration du peintre fasciné par son image :

" Moi, Albrecht Dürer de Nuremberg, me suis peint à l'âge de vingt-huit ans avec des couleurs éternelles."


Albrecht Dürer (1471-1528), Autoportrait
huile sur bois, 1500, 48,9 x 67,1 cm.

Image empruntée ici


Le noir qui définit l'arrière-plan est un infini cosmique dans lequel flotte l'image du peintre. C'est une couleur ou une non-couleur qui invite à la méditation – stade du miroir qui annonce les théories de ce cher Sigmund. L'introspection  sdevant le reflet de son image est un espace non limité, une plongée dans les ténèbres de notre inconscient. En cela, l'autoportrait est une quête sans cesse renouvelée dont l'objectif est de sonder ce noir existentiel.

Lors de la Réforme, Luther impose un noir austère, en phase avec les principe de la nouvelle foi qu'il souhaite propager. Il n'en rejette pas pour autant les images car il veut atteindre le plus grand nombre. Le réformateur noue une amitié avec le peintre Lucas Cranach qui est devenu un fervent disciple. 


Lucas Cranach (1472-1553), portrait de Luther, 1529
 huile sur panneau, 23 x 36,5 cm.
Image empruntée ici

Rembrandt (1606/1607), Autoportrait, 1669
huile sur toile, 60,2 x 65,4 cm. 
Image empruntée ici

En Angleterre, puis en Amérique, les Puritains porteront des habits noirs pour affirmer leur rejet des fastes attachés à la religion anglicane. Habits noirs et larges chapeaux, grands cols brodés et gants éclatant de blancheur. C'était la tenue des plus aisés. Les Puritains plus modestes étaient plutôt vêtus de brun ou d'indigo. 



Thomas Smith (1650-1691), Autoportrait, 1680
Huile sur toile, , 60 x 62 cm.
Image empruntée ici


Dans les dernières années du 18e siècle, des "autrices" anglaises inventent le roman noir – récits mystérieux et horrifiques où le désir se fait noir. 
À l'aube du siècle suivant, les romantiques abandonnent  le vert et le bleu pour se tourner vers le noir qui sied aux tourments de leur âme. Alfred de Musset, dans La nuit de décembre, rencontre "un étranger vêtu de noir qui me ressemblait comme un frère".  

Léon Bonnat peint Victor Hugo en 1879, en utilisant une technique proche de l'art flamand. La lumière jaillit du noir et Hugo est magnifié, statufié dans la posture de l'écrivain dont l'apparente sérénité abrite des tempêtes intérieures. 


Léon Bonnat (1833-1922), portrait de Victor Hugo, 1879
Huile sur toile, 110 x 138 cm
Image empruntée ici


Nadar (aka Felix Tournachon, 1820-1910), 
Portrait de Victor Hugo, 1884
Image empruntée ici

La photographie en noir et blanc supplante la gravure et l'estampe grâce à l'invention de Nicéphore Niépce en 1822. 
Dans cette photographie de Nadar, la pose est inversée, la tête de Victor Hugo repose sur sa main droite, signe d'une intense activité intellectuelle. Le photographe capte un instant de vie en noir et blanc. Le regard de l'écrivain-poète échappe à l'objectif. Ce visage sillonné de rides suggère que Victor Hugo est dans un ailleurs d'un noir cosmique. Ne dit-on pas que l'on est perdu dans ses pensées ? 

Le noir traverse l'œuvre d'Hugo en une dialectique constante entre la lumière et les ténèbres. Chez Hugo, le noir est infini, parfois gorgé de bruns couleur café dans ses dessins et estampes. 


Image empruntée ici

El Desdichado

Je me souviens avoir écouté en boucle Gérard Philipe sur mon Teppaz. Sa voix chaude, sa diction parfaite berçaient mes tourments d'adolescent. Je me suis enivré du poème de Gérard de Nerval, El Desdichado. Je ne comprenais pas vraiment la signification de ce soleil noir de la mélancolie, mais il résonnait en moi dans la sublime beauté de cet oxymore. 

Vous aurez certainement remarqué des manques, des omissions ; vous aurez été surpris, voire irrités que je ne consacre pas quelques paragraphes à des peintres ou des écrivains pour qui le noir est primordial. La peinture, le dessin, l'estampe offrent des variations fascinantes autour du noir. En vrac, Velasquez, Goya, Manet, Redon, Malevitch, Michaux, Kapoor, Serra, Pollock, Rothko, Delacroix, Matisse...


     

Francisco de Goya (1746-1828), La duchesse d'Albe, 1797
Huile sur toile, 130 x 194 cm
Image empruntée ici


Edouard Manet (1832-1883), Berthe Morisot au bouquet de violettes, 1872
Huile sur toile, 40,5 x 55,5 cm
Image empruntée ici



Mark Rothko (1903-1970), Untitled : Black, Red over Black on Red, 1964
Huile sur toile, 193 x 205 cm
Image empruntée ici


Eugène Delacroix (1798-1863), Autoportrait, 1816
Huile sur toile, 50,5 x 60,5 cm
Image empruntée ici

À distance, via l'écran de mon ordinateur, je vous sens quelque peu fâchés. Aurait-il délibérément fait l'impasse sur le maître de l'Outrenoir ? Est-ce possible ? Rassurez-vous, j'y viens. C'est à lui que revient l'honneur de clore ce billet de blog et c'est justice. 

Le musée Soulages



© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023




© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023




© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023

L'été dernier, j'ai proposé un périple en France à mon épouse. Notre première étape fut Rodez et notre visite au musée Soulages fut bien au-delà des nos attentes. C'est un lieu magique conçu par le cabinet d'architecture Roques & Passelac. Le bâtiment s'étend sur plus de 6000 m2. Situé au cœur du jardin du Foirail, des constructions cubiques occupent l'espace d'ouest en est.



© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023



© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023



© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023


C'est ainsi que le musée  présente sa collection et définit sa mission :

"C'est à Rodez, sa ville natale qu'il a consenti, avec son épouse Colette, trois donations, plus de 500 œuvres, témoignant de l'ensemble de sa production : des huiles sur toile, des peintures sur papier, tout l'œuvre imprimé, les cartons des vitraux de Conques, trois bronzes dorés, le vase du tournoi de sumo (Sèvres 2000) . En 2020, le musée s'est enrichi de dons d'importance, notamment d'Outrenoirs : il offre désormais un panorama de 1934, premières œuvres figuratives, à 2019, avec le grand Outrenoir des cents ans de Soulages. Le musée est un voyage entre les différentes créations et les techniques qui les ont vues naître. "Plus les moyens sont limités, plus l'expression est forte" affirme le peintre."


© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023

De la peinture en tant qu'exigence

Pierre Soulages ne fait partie d'aucune chapelle, il se situe "ailleurs". Il définit ainsi sa peinture : "Ni figures, ni figuration de mouvements, ni états d'âme, la peinture n'a pas à représenter autre chose qu'elle même. Ce qui veut dire qu'elle renvoie aussi le spectateur à lui-même." 

Son travail est matière et vibration, surface creusée de sillons, éclats de lumière et traces opaques. Il est vain d'y chercher un quelconque message; cette matière est non-signifiante. Et pourtant, de manière souterraine, un dialogue silencieux propre à la méditation s'établit entre le peintre et le regardeur. À l'instar de Victor Hugo, Soulages est un "semeur d'éblouissements". 
La peinture de Soulages est à la fois plénitude et manque. Elle impose une énergie noire qui nous submerge et elle nous propulse dans un ailleurs indéfinissable et illimité.


© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023

Un espace de questionnement et de méditation

Contrairement à de nombreux peintres, Pierre Soulages sait porter un regard affûté sur sa peinture et ses intentions artistiques :
"Ma peinture est un espace de questionnement et de méditation où les sens qu'on lui prête peuvent venir se faire et se défaire. Parce qu'au bout du compte l'œuvre vit du regard qu'on lui porte. Elle ne se limite ni à ce qu'elle est, ni à celui qui l'a produite, elle est faite aussi de celui qui la regarde.
Je ne demande rien au spectateur, je lui propose une peinture : il en est le libre et nécessaire interprète."

Outrenoirs. Entretiens avec Françoise Jaunin, 
© La Bibliothèque des Arts, 2012

 



© Jacques Lefebvre-Linetzky, 2023

Les Outrenoirs, une découverte fortuite, 
selon Pierre Soulages

Les Outrenoirs de mes toiles ne sont pas nés d'une décision volontaire. je ne me suis pas réveillé un beau matin de janvier 1979 en me disant : "Tiens, je vais faire un tableau tout noir." Pas du tout. Au point que, quand mon premier tableau entièrement noir est apparu, j'ai pensé qu'il était complètement raté. Le noir avait tout envahi, cela faisait des heures que je peinais et m'acharnais sur ma toile. Je déposais de la pâte noire, puis je la retirais, j'en rajoutais à nouveau et je recommençais à l'enlever ... Je pataugeais, je m'obstinais, tout était recouvert de noir, c'était sans issue. Et pourtant, quelque chose me poussait à continuer quand même, jusqu'aux limites de la fatigue. Une sorte de nécessité intérieure me forçait à poursuivre. Épuisé, je me suis arrêté et je suis allé dormir. en me réveillant, je suis allé revoir ma toile et c'est alors que je me suis rendu compte que j'étais en train de faire quelque chose que je n'avais jamais fait auparavant : le noir n'était plus noir, il devenait le siège d'une lumière particulière, et c'est cela qui m'occupait. Il créait un espace qui lui était propre : une aventure nouvelle  commençait. Mais c'était arrivé fortuitement. 

Outrenoirs. Entretiens avec Françoise Jaunin, 
© La Bibliothèque des Arts, 2012.


Parce qu'il faut bien conclure...

J'en ai terminé avec ce voyage, forcément incomplet, au pays du noir, au pays des noirs teintés de bleus ou d'ocres, au pays des noirs lumineux striés d'ombres au cœur de la matière. Le noir est vertige, le noir est séduction, le noir est angoisse, le noir est sans mots, bouche bée, bouche béante ; le silence lui sied tandis que le regardeur plonge dans les souvenirs obscurs enfouis dans la nuit de son inconscient. 

Textes en regard

El Desdichado

Je suis le Ténébreux, — le Veuf, — l'Inconsolé, 
Le Prince d'Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, — et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m'as consolé,
Rends moi le Pausillipe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phébus ? ... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ; 
J'ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée 
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.

Gérard de Nerval, Les Chimères, 1854 

Pour écouter Gérard Philippe, cliquez sur ce lien

L'encre était noire ...

L'encre était noire, dans les encriers et flacons, autrefois. On s'en mettait plein les doigts, car elle bavait et coulait sans merci. Cette inéluctable salissure était l'envers de l'écriture. Je me sentais toujours pris entre deux noirs : celui de la matière sale et salissante, et celui des signes qui miraculeusement en sortaient par la magie de plumes rétives qui, trop trempées dans l'encrier, avaient une forte tendance à joncher la feuille de ce qu'on appelait des "pâtés d'encre". 

Alain Badiou, Le noir. Éclats d'une non couleurAutrement, 2015

L'encre et le papier

Nombreuses sont au Moyen Âge, en ancien et moyen français, les expressions qui cherchent à exprimer par des comparaisons simples le degré de noirceur d'un objet ou d'un être vivant : "noir comme le corbeau", "noir comme la poix", "noir comme le charbon", "noir comme la mûre", "noir comme de l'encre". Avec l'imprimerie, cette dernière expression prend une valeur emblématique et semble d'un usage plus fréquent que toutes les autres : l'encre devient le produit noir par excellence. Ce n'est plus l'encre des écritures manuscrites, légère, inégale, laborieusement tracée sur le parchemin et devenue parfois au fil du temps plus brune ou beige que noire. C'est une encre grasse et épaisse, très foncée, qu'une presse mécanique a fait pénétrer dans les fibres du papier et qui a parfaitement résisté aux différentes vicissitudes subies par les livres.Tout lecteur ou simple curieux qui ouvre un ouvrage imprimé du XVe siècle est frappé, à plus de cinq siècles de distance, par la blancheur du papier et la noirceur de l'encre. 

Michel Pastoureau, Noir, histoire d'une couleurPoints, Éditions du Seuil, 2008

L'espace est noir

L'espace est noir, l'onde est sombre ;
Là-bas, sur le gouffre obscur,
Brillent le phare dans l'ombre 
Et l'étoile dans l'azur.

La nuit pose, pour la voile
Qu'emportent les vents d'avril,
Dans l'espoir sans fin l'étoile,
Le fanal sur le péril.

Deux flambeaux ! doublé mystère,
Triste ou providentiel !
L'un avertit la terre,
Et l'autre avertit du ciel. 

Victor Hugo, 1855


Le noir ramène au fondement, à l'origine

Dès que je commence, dès que se trouvent mises sur la feuille de papier noir quelques couleurs, elle cesse d'être feuille, et devient nuit. Les couleurs posées presque au hasard sont devenues des apparitions ... qui sortent de la nuit. 
Arrivé au noir. Le noir ramène au fondement, à l'origine. 
Base des sentiments profonds.  De la nuit vient l'inexpliqué, le non-détaillé, le non-rattaché à des causes visibles, l'attaque par surprise, le mystère, le religieux, la peur... et les monstres, ce qui sort du néant, non d'une mère. 

Henri Michaux, Émergences-Résurgences, Les Sentiers de la Création, 1993

La noirceur bat au cœur du monde

La nuit utérine est en chacun de nous ce que le noir intersidéral prolonge au fond du ciel.
Dès la préhistoire la femme enceinte est figurée comme cette voûte obscure qui englobe le monde et le reproduit. La première déesse est une Mère.
À la discontinuité des jours s'oppose la continuité de la nuit. Le rêveur, fermant les yeux, se confiant à la nuit, rejoint le sans durée. Alors, par elle, au gré des songes, les morts, les perdus, les sans retours, reviennent vers nous, en nous.
En Grèce Nyx, fille de Chaos, mère du ciel et des jours, du sommeil et des rêves, de la détresse des hommes et des filles du soir, regagne à l'aube son séjour à l'extrême ouest au-delà du pays d'Atlas. Nyx est la sœur d'Érèbe, reine des ténèbres qui sont au-dessous de la terre et que connaissent seulement les morts. 

Pascal Quignard, La nuit sexuelle, Flammarion, 2007

Liens

Pour écouter Black is Black par le groupe Los Bravos,  cliquez sur ce lien
Pour écouter Armstrong par Claude Nougaro, cliquez sur ce lien.
Pour écouter Je veux être noir par Nino Ferrer, cliquez sur ce lien
Pour écouter Sarah Vaughan chanter Lullaby of Birdland, cliquez ici

Pour découvrir l'exposition Soleils noirs au Louvre-Lens (25 mars 2020 - 25 janvier 2021, cliquez sur ce lien








Thomas Alexander Harrison (1853 - 1930), Solitude, 1893
Huile sur toile, 105 x 171,2 cm
Image empruntée ici







mercredi 2 août 2023

PETER ANDERSON, PAYSAGES CARTOGRAPHIQUES


Il n'existe aucune carte complètement adéquate, car l'inadéquation est intrinsèque à la cartographie (...) Une carte est schématique, sélective, conventionnelle, condensée et uniforme. 

Nelson Goodman, Problems and Projects, Indianapolis/New York,
Bobbs-Merrill, 1972. 




© Peter Anderson 

Le temps file au gré des projets

Comme vous avez pu le constater, cela fait quelques mois que j'ai disparu des radars. J'ai tout simplement été très occupé  et peu disponible. J'ai, en effet, commis la grave erreur de mener deux projets à la fois, ce qui est, chacun le sait, très difficile pour un homme. 

J'ai consacré de longues heures à préparer une exposition éphémère de mes assemblages dans le jardin d'un ami. Je vous l'ai déjà dit, j'aime recycler des choses destinées à être mises au rebut. J'ai donc passé beaucoup de temps à scier, coller, visser, peindre et repeindre des chutes de bois et autres palettes. Je me suis rendu régulièrement au marché au puces de Nice pour y chiner des bouts de ferraille. On me prend pour un farfelu et c'est tout à fait juste. Bricoleur-farfelu, ça me va bien. 

Et puis, parallèlement,  j'ai mené à bien la publication d'un livre consacré à mes jeux d'écriture. C'est un bel objet qui inaugure une série de cinq. (Disponible sur demande). J'ai donc des livres sur la planche. 


Bon, c'est bien beau tout ça, mais ce blog n'est pas exclusivement consacré à la promotion de mes travaux. En fait, je suis plutôt nul en matière d'auto-promotion. 

J'ai envie de vous faire découvrir le travail d'un peintre abstrait qui s'intéresse aux paysages, à la cartographie, à la musique et aux vibrations du monde. Il s'appelle Peter Anderson et il vit dans le New Hampshire aux États-Unis. 



Peter Anderson dans son atelier
Image empruntée ici 




L'atelier de Peter Anderson
© Peter Anderson


Peter Anderson, un peintre atypique

Tout d'abord, il me faut vous présenter Peter Anderson dont on peut dire qu'il est un peintre atypique, toujours en quête  d'une abstraction empreinte d'un réalisme discret et évocateur. 

Il est titulaire d'une licence d'anglais, qu'il a complétée par un MBA - Master of Business Administration obtenu à la Thunderbird School of Global Management, ce qui lui a permis d'obtenir des compétences managériales. Il a enseigné l'anglais au Japon ; il a travaillé dans le milieu bancaire international; il a créé de nombreuses entreprises dans des domaines aussi variés que l'industrie du textile et la technologie de pointe. C'est un artiste dans l'âme qui s'est tout d'abord consacré à la musique, parallèlement à son activité professionnelle. C'est à l'âge de 40 ans que la peinture le prend par la main. À l'époque il vivait à Ocean Park, un quartier de Santa Monica, là-même où Richard Diebenkorn à peint sa célèbre série. Peter Anderson avoue avoir commencé à peindre de manière intuitive. Sa pratique s'est ensuite affinée au cours de ses nombreux voyages. Il aime peindre des paysages comme s'il était à bord d'un avion. Il utilise la peinture à l'huile en couches fines et affectionne des grands formats, le plus souvent des formats carrés (122 x 122 cm). Il peint des lieux, des saisons, des impressions subtiles en y mêlant parfois des souvenirs remontant à son enfance dans le Nouveau-Mexique. En 1999, il s'est installé dans le New Hampshire. 

Depuis quelques années, il a levé le pied professionnellement pour consacrer plus de temps à sa passion. Il maintient toutefois une activité professionnelle en tant que directeur associé du Black Iron Group, un intégrateur de solutions informatiques (a systems integrator). 

Peter Anderson est un autodidacte en matière artistique. Il s'est laissé guider par sa créativité et n'a bénéficié d'aucune formation théorique ou pratique. Ce qu'il sait, il l'a appris seul et, depuis des années, chaque jour, il consacre  quelques heures à son art. 

L'influence de Richard Diebenkorn




Son travail a été largement influencé par celui de Richard Diebenkorn et en particulier par la série Ocean Park. Pendant plus de vingt ans, à partir de 1967, Richard Diebenkorn s'est consacré à une série inspirée par le paysage qu'il voyait depuis son atelier dans le quartier d'Ocean Park situé à la lisière de Los Angeles. De sa fenêtre, il voyait la géométrie en damiers des rues, les espaces des collines avoisinantes et les teintes changeantes de l'océan Pacifique où le bleu turquoise côtoyait un vert d'une densité variant de l'émeraude au verdâtre. Ainsi, Richard Diebenkorn a composé un ensemble d'œuvres (au total 145 tableaux aux dimensions cinématographiques) où la composition vibre au gré des couleurs et de la lumière; une géométrie poétique et savante qui suggère le réel et suscite une méditation qui relève du spirituel. 

Peter Anderson revendique également l'influence d'Helen Frankenhalter, de Mark Rothko et même de Robert Rauschenberg. 



Helen Frankenhalter, The Bay, acrylique sur toile, 1963
photo : Steven Zucker © Estate of Helen Frankenhalter



Il se situe dans la lignée du Color Field painting movement qui s'est développé aux États-Unis et au Canada dans les années 40 et 50. Il s'agit d'un mouvement proche de l'expressionnisme abstrait fait d'aplats de couleurs vives où toute figuration est exclue. 

Voici deux versions d'Ocean Park par Peter Anderson - l'hommage est évident. 


Ocean Park Map # 28
© Peter Anderson


Ocean Park, map # 29
© Peter Anderson



L'art des séries

Comme Diebenkorn, Peter Anderson aime se consacrer à des séries. C'est une démarche essentielle pour tout créateur : peindre, se renouveler sans cesse et, malgré tout, rester fidèle à l'intention première. La verticalité et l'horizontalité semblent se confondre en une seule et unique représentation. C'est une entreprise grisante et exigeante. 



Clovis #1, #2, #3
© Peter Anderson

La série ci-dessus, intitulée Clovis 1,2,3, a été réalisée durant l'été 1992 lors des émeutes raciales qui se sont déroulées à Los Angeles à la suite de la mort de Rodney King. Peter Anderson vivait alors dans 
Little Tokyo, le quartier japonais de Los Angeles, tandis que la violence secouait la mégalopole de toutes parts. Afin de s'isoler du fracas des émeutes, il  a peint ces trois toiles à l'huile, technique qu'il n'avait pas utilisée auparavant. 

Peter Anderson s'est attaqué à un travail à la fois musical et pictural à partir des Variations Goldberg. Ce travail compte 300 tableaux. 


Goldberg Factorial - State #1
© Peter Anderson
Image empruntée ici


Goldberg Parsifal Series -GBV#150
The Chalice of The Holy Grail
© Peter Anderson
Image empruntée ici



Une telle profusion est rendue possible grâce à une technique très sophistiquée : il utilise des plaques de plexiglas qu'il photographie pour ensuite les imprimer et les retravailler. Il appelle cela de la manipulation photographique. Le terme peut paraître quelque peu négatif, mais il n'en est rien tant la démarche implique une maîtrise totale de différents outils. 

Sa sensibilité fait écho aux fracas du monde; c'est ainsi qu'il a réalisé une série consacrée à la bombe atomique il y a trois ans à l'occasion du 75e anniversaire du bombardement nucléaire qui a ravagé Hiroshima et Nagasaki. La série inclut également les essais nucléaires à Los Alamos. 


Los Alamos # 4
© Peter Anderson
Image empruntée ici




Hiroshima  #3
© Peter Anderson
Image empruntée ici



Nagasaki  #10
© Peter Anderson
Image empruntée ici




Il s'est également attaqué à une œuvre majeure de la littérature japonaise, Le Dit du Genji en 54 tableaux qui suivent les chapitres de l'œuvre littéraire. 



Genji # 16
© Peter Anderson
Image empruntée ici

Chercheur infatigable, il a construit une série à partir de Macbeth. Elle comporte 6 tableaux, chacun faisant référence à une citation du texte de Shakespeare. 

Les cartes, une célébration poétique


© Peter Anderson

Vous allez penser que c'est une idée bien saugrenue d'avoir une approche abstraite de la cartographie. Pourtant, cela fait sens et j'essaierai de vous le démontrer. 

J'ai moi-même un grand intérêt pour les cartes qui remonte à l'enfance. Je me souviens avoir passé des heures en classe de quatrième à dessiner à la plume une carte de la Grèce antique. Dans un passé moins lointain, j'ai été émerveillé par l'ultime exposition de mon ami Jean-Marie Pouey, peu de temps avant son décès. Cette exposition s'intitulait, Voyages immobiles. Amateur de voyages, Jean-Marie voyageait alors dans sa tête car tout déplacement lui était impossible. 

Je dois vous l'avouer, je ne suis pas un grand voyageur et les temps présents n'arrangent rien. 



Carte babylonienne du monde
British Museum (BM 92687)

Image empruntée ici

Les cartes font rêver surtout les cartes anciennes, maladroites, inexactes, inscrites sur des tablettes ou des parchemins et plus tard diffusées en grand nombre grâce à l'invention de l'imprimerie. Au fil des siècles, les hommes ont pris la mesure de l'ampleur et de la complexité du monde dans lequel ils vivaient. 



Nicolas Bion, Globe terrestre dressé sur les observations de Mrs de l'Académie royale des sciences et sur les nouveaux mémoires des plus fameux et expérimentés voyageurs, Paris, avant 1733

Source: Gallica

Image empruntée ici


Cela implique toujours une remise en question de ce qui semble être acquis, grâce aux progrès de la science et aux découvertes qui repoussent les limites de nos connaissances. Il est fascinant de mettre côte-à-côte la carte babylonienne du monde (Mappa Mundi) où la terre est figurée par un cercle bordé par la mer et où Babylone, au centre de ce monde, est indiquée par un orifice, d'une part et, d'autre part, avec les photos récentes de Thomas Pesquet, où la rotondité du monde éclairée par une lumière diffuse, et malgré tout intense, prend la forme d'une célébration poétique. 


© Thomas Pesquet
Image empruntée ici


The New Hampshire Topo Series

Il y a quelques années, l'un de ses amis lui a offert un ensemble de cartes topographiques du New Hampshire datant des années 50. Ayant toujours recours à des plaques de plexiglas, il en a décalqué les lignes et les sinuosités au crayon graphite. Il s'est ensuite servi du programme Procreate sur son Ipad pour finalement créer une œuvre originale mêlant le dessin, la peinture traditionnelle (gouache ou aquarelle) et la peinture digitale. 



New Hampshire Topo Series # 18
© Peter Anderson
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New Hampshire Topo Series 
Holderness Quadrangle Abstraction # 4
© Peter Anderson
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New Hampshire Topo Series
 
Hanover Quadrangle abstraction
© Peter Anderson
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New Hampshire Topo Series
 
Holderness 2
© Peter Anderson
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C'est une vision morcelée qui nous invite à scruter le monde les yeux mi-clos afin d'en percevoir le relief et l'harmonie des couleurs. Ces fragments sont cernés de lignes – routes et rivières forment un labyrinthe où le regard se perd dans un monde qui reste, malgré tout, familier. On imagine même que des habitants de ces lieux n'auront aucun mal à les reconnaitre. C'est un monde plat, mis à distance comme il convient pour les photographies aériennes.
En outre, ce travail fait écho à une nouvelle appréhension du monde qui nous entoure grâce à Google Maps et aux photographies transmises par les drones. Notez au passage combien les drones ont transformé notre perception des vues en plongée au cinéma. 
Peter Anderson invente une grammaire poétique de notre appréhension du monde. 

La guerre vue du ciel


Landscape of War #13
Mariupol.  1
© Peter Anderson 
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Il s'agit d'une série réalisée en 2022 dans le cadre d'une recherche graphique sur le siège de Marioupol par les troupes russes. Cette bataille s'est déroulée du 24 février au 22 mai 2022 et s'est soldée par la reddition des troupes ukrainiennes aux troupes russes.

Ce paysage aérien retravaillé par Peter Anderson relève d'une abstraction réaliste. On reconnait le quadrillage  des différents quartiers de la ville et probablement la ligne de front qui délimite deux zones aux couleurs contrastées. Les aplats et les lignes donnent une impression de relief. La guerre est présente, le bombardement est suggéré, mais la destruction est mise à distance, elle est une représentation abstraite.

De nombreuses images satellite ont été publiées dans la presse soulignant l'intensité des bombardements. Remarquons au passage que Peter Anderson a choisi de ne pas faire figurer l'embrasement de la cité portuaire afin de maintenir une abstraction qui permette au regardeur d'appréhender le caractère universel des horreurs de la guerre. 




Le siège de Marioupol
TV5 Monde
© Planet Labs PBC via AP
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Pour conclure

Vous l'aurez compris, Peter Anderson n'est pas qu'un observateur, son investissement en tant qu'artiste est, pour lui, une valeur essentielle. Ses peintures hybrides sont aussi bien une sublimation des paysages qu'il garde en mémoire qu'un amplificateur du tumulte du monde. Enfin, il nous invite et nous force en quelque sorte à nous plonger dans l'univers de ses séries où chaque représentation est unique. C'est une œuvre magnifique et grandiose dont on ne se lasse pas. 

Textes en regard



© Peter Anderson

"La cartographie a pour but la conception, la préparation et la réalisation de cartes. Sa vocation est la représentation du monde sous une forme graphique et géométrique. En cela, elle répond à un besoin très ancien de l'humanité qui est de conserver la mémoire des lieux et des voies de communication ainsi que de leurs caractères utiles ou hostiles à l'activité des hommes. D'abord stricte description de la Terre connue et des itinéraires maritimes ou terrestres parcourus par les militaires et les marchands, la cartographie s'est diversifiée avec le temps. Grâce à son efficacité, elle est devenue à partir du XVIIe siècle un instrument de connaissance et de puissance au service des États et un moyen de prévoir et de planifier l'action de l'homme sur le milieu. 
Science exacte, d'essence mathématique, la cartographie est aussi un art dans la mesure où elle impose de nuancer et de compléter l'objectivité des mesures de la Terre par des interprétations subjectives. Comme science, elle est tributaire des progrès des connaissances ainsi que du progrès des instruments et des méthodes d'observation et d'évaluation des phénomènes qu'elle a pour mission de représenter."

Guy Bonnerot, Estelle Ducom, Fernand Joly, Cartographie, Encyclopædia Universalis. 



Map # 122, 2023
© Peter Anderson
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... " En cet empire, l'Art de la Cartographie fut poussé à une telle perfection que la Carte d'une seule Province occupait toute une Ville et la Carte de l'Empire toute une Province. Avec le temps, ces Cartes Démesurées cessèrent de donner satisfaction et les Collèges de Cartographes levèrent une Carte de l'Empire qui avait le Format de l'Empire et qui coïncidait avec – lui, point par point. Moins passionnées pour l'Étude de la Cartographie, les Générations Suivantes réfléchirent que cette Carte Dilatée était inutile et, non sans impiété, elles l'abandonnèrent à l'Inclémence du Soleil et des Hivers. Dans les Déserts de l'Ouest, subsistent des Ruines très abîmées de la Carte; des Animaux et des Mendiants les habitent. Dans tout le Pays, il n'y a plus d'autre trace des Disciplines Géographiques ". 

Suarez Miranda, Viajes de Varones Prudente, Lib.IV, Cap.XIV, Lérida, 1658.

Cité par Jorge Luis Borgès en final de son Histoire universelle de l'infamie - Histoire de l'infamie, Histoire de l'éternité, traduit par Roger Caillois et Laure Guille -, 10/18, 1994. 


 
Carte du Tendre, F. Chauveau, 
extraite de Clélie, Histoire romaine, Madeleine de Scudéry, 1654. 
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" Vous vous souvenez sans doute bien, madame, qu'Herminius avait prié Clélie de lui enseigner par où on pouvait aller de Nouvelle-Amitié à Tendre, de sorte qu'il faut commencer par cette première ville qui est au bas de cette carte pour aller aux autres; car, afin que vous compreniez mieux le dessein de Clélie, vous verrez qu'elle a imaginé qu'on pouvait avoir de la tendresse pour trois causes différentes : ou pour une grande estime, ou par reconnaissance, ou par inclination; et c'est ce qui l'a obligée à établir ces trois villes de Tendre sur trois rivières qui portent ces trois noms et de faire aussi trois routes différentes pour y aller. Si bien que, comme on dit Cumes sur la mer d'Ionie et Cumes sur la mer de Tyrrhène, elle fait qu'on dit Tendre-sur-Inclination? Tendre-sur-Estime et Tendre-sur-Reconnaissance. Cependant comme elle a présupposé que la tendresse qui naît par inclination n'a besoin de rien autre chose pour être ce qu'elle est, Clélie, comme vous le voyez, madame, n'a mis nul village le long de ses rives pour aller de Nouvelle-Amitié à Tendre". 

Clélie, histoire romaine, Madeleine de Scudéry, 1654-1660.

Et maintenant, partez à la recherche du trésor...



Vous pourriez également être tenté(e) de suivre Lemuel Gulliver ..


Illustration, Willy Pogány, 1917
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Et pour terminer, trouvez le titre du roman qui se cache derrière cette carte...


C'est tellement facile que je n'ose vous faire l'affront de vous donner la réponse. 



Je tiens à remercier Peter Anderson pour son aide et son entière disponibilité. Ce fut un bonheur de travailler avec lui et de découvrir son travail si novateur. 

Le site de Peter Anderson, c'est ici


Bel été à toutes et à tous. Merci de me lire avec patience et obstination et ce, depuis 2015.