UTILE À SAVOIR


Ce blog est alimenté par Jacques Lefebvre-Linetzky. Commentaires et retours bienvenus.


samedi 14 avril 2018

PIERRE LESIEUR AU MUSÉE BONNARD


La peinture est une poésie qui se voit 
et ne s’entend pas, 
et la poésie est une peinture qui s’entend 
et ne se voit pas.

Léonard de Vinci

 Escapade 

Connaissez-vous Le Cannet, cette charmante petite ville qui surplombe Cannes ? C’est un lieu magique, à l’écart des paillettes de la Croisette. Des hauteurs du Cannet, on peut voir la mer s’étirer en couleurs changeantes et les îles de Lérins laisser leur empreinte au gré des vagues et des vents.



© Jacques Lefebvre-Linetzky


C’est une ville où il fait bon se promener. On ralentit le pas, on musarde dans les jardins du Tivoli, on médite devant une plaque posée par l’AMEJDAM en souvenir des Juifs déportés et puis, au détour du chemin, on découvre des demeures d’un autre temps et on rêve à rebours. En surplomb de la rue principale, la ville s’accroche à une colline en un réseau de petites rues qui mènent à une place où l’on peut s’arrêter pour prendre un verre et même s’offrir un bon repas tout en admirant le panorama.

J’ai une tendresse particulière pour la rue Saint-Sauveur. C’est là que "je me suis exposé" pour la toute première fois. L’exposition s’appelait Déchirures et la municipalité m’avait accueilli avec générosité dans une coquette galerie au bas de la rue. C’était en 2005.

mercredi 4 avril 2018

BERNARD HEJBLUM, LE SCULPTEUR DE CAGES





Bernard Hejblum, une force sensible

Bernard Hejblum est né en 1931 à Paris, à la "Ruche". Ses parents y étaient venus de Pologne. Pendant la guerre, il trouve refuge dans les Landes de 1941 à 1946. Sa vie est riche de mille expériences, de mille traversées et autres aventures. Enfant caché, il a gardé les vaches et s'est pris de passion pour la forêt des Landes. Il n'a cessé de se construire et de se reconstruire. Il a été chef d'entreprise, marchand de tableaux, dénicheur de talents. Sans cesse en mouvement, il est d'une extraordinaire créativité. 
Lorsqu’on le côtoie, on songe immédiatement à un arbre. Il en a la force, la fragilité, la rugosité, la tendresse. Les pieds fermement arrimés à la terre, il se souvient, il crée, il s’indigne, il écrit, il griffe des mots, il vit au gré des bourrasques, son cœur palpite sous l’écorce…






Un ciseleur de rêves de liberté



© Bernard Hejblum 2016


Bernard est un artiste, un sculpteur de cages, un écraseur de grilles, un broyeur de mailles, un ciseleur de rêves de liberté…




© Bernard Hejblum, 2001

"Mon travail consiste à écraser des cages, c’est une façon pour moi de soigner ma névrose de l’enfermement. C’est un travail que j’ai commencé il y a bien longtemps, ce n’était pas pour moi un travail. Je me souviens de la première cage que j’ai fracassée… je l’avais ramassée dans une maison abandonnée et puis d’autres ont suivi jusqu’au moment où j’en ai eu une grande quantité que j’accrochais sur un mur de ma propriété comme des trophées. Un jour Frédéric Altmann et France Delville m’ont conseillé d’exposer mes œuvres. Pendant longtemps, j’ai refusé d’exposer. Mon père m’avait dit tout de suite après son retour d’Auschwitz, « surtout mon fils, ne te fais pas remarquer » et quelque part, exposer, c’est également s’exposer.
Je me suis finalement laissé convaincre. Mes amis m’ont préparé une première exposition et puis d’autres ont suivi et je continue toujours à soigner ma névrose en écrasant des cages.
J’écrase des cages pour dire combien la liberté est précieuse. Se battre pour la liberté des autres, c’est aussi se battre pour sa propre liberté. Pour moi, l’essence de l’individu, c’est de vivre libre. Pour moi, c’est une révolte, un combat, c’est une résistance. La liberté est un bien précieux qu’il faut nourrir. Écraser des cages pour moi, c’est une façon de dire quelque chose et non pas de montrer."

Entretien accordé à l'AMEJDAM en novembre 2015, voir lien ici


ENFERMEMENT ET LIBERTÉ 
une exposition à L'Espace Wilson, 2, place Wilson, à Nice, 
du 3 avril au 20 avril 2018. 




Bernard Hejblum présente 15 sculptures, 15 cages fracassées, aplaties, compressées. Il dit et redit son refus de l'enfermement, mais c'est aussi une célébration de la liberté. Ces actes de destruction donnent naissance à de nouvelles structures où la liberté s'exprime dans une grande rigueur formelle. Il martèle le message – c'est à la fois évident et d'une grandiose simplicité. Les structures s'impriment dans notre mémoire et, une fois achevé le périple d'une œuvre à l'autre, reste le souvenir de l'émotion et la densité du propos. On reste fasciné par ces enchevêtrements savamment orchestrés. Les mailles des fils de fer jouent avec la lumière; un détail accroche notre regard, une petite clef sollicite notre imaginaire – est-ce la clef de l'enfermement ou celle de la liberté? À moins qu'il ne s'agisse de la clef des songes...






© Bernard Hejblum, 1998 



Des textes en regard des sculptures


Enfermement et Liberté

Comment dire la Liberté si ce n'est en montrant
ce qui s'oppose à elle - les cages, les chaînes et tous les
enfermements, pour les réduire à néant ?

****
Créer, acte de Liberté, partager son histoire,
pour donner sens au monde et emprunter
sa voie pour exister.

****
S'écarter, ne pas suivre la foule.
Liberté affichée n'est pas facilité.
Souvent adhérer c'est se couler dans le moule
Le plus grand nombre peut aussi se tromper. 

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Enfermer même la pensée pour mieux la contrôler,
cages et prisons immatérielles, l'homme en est l'auteur
d'une effroyable rigueur.
Écraser ces cages, abjections d'enfermements
politiques ou religieux, mais être libre de ses usages.

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La Liberté est un jardin où l'on laisse pousser 
les mauvaises herbes.
La plus difficile à porter est moins lourde
que la plus légère des chaînes. 

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Obsession de la Liberté, détruire toutes les cages, aller au bout de son dessein
sans être sûr d'y parvenir, mais au moins tout essayer. 

L'interrogation


Bernard Hejblum écrit chaque jour, jusqu'à plus soif. Le poème ci-dessous date de Noël 2013.

Demain? 

Encore en vie, détruit enfant avant de me construire.
Pour me venir en aide ils sont nombreux à me dire de vivre et d'oublier.
Remèdes sans effets qui n'ont jamais calmé mes peurs ni mes angoisses.
Alors, à l'écart, faute de parler, j'écris, j'écrase des cages, j'y enferme parfois des clefs. 
Serait-ce une maigre consolation d'être mis en terre au cimetière de Bagneux dans le carré juif où repose Barbara? Nous pourrions converser. Au même âge que moi, elle a connu l'enfer de la traque et a échappé au massacre. 
Je pourrais alors me reposer et dormir de vraies nuits le reste de mes jours. 

Bernard Hejblum


Pour écouter Barbara chanter "Une petite cantate", cliquez ici

Et maintenant, il ne vous reste plus qu'à vous rendre à l'Espace Wilson, 2 place Wilson, à Nice, France.