UTILE À SAVOIR


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lundi 4 mai 2015

ARMAND ET JOËL SCHOLTÈS, L'ARPENTEUR ET LE GARDIEN




© Jacques Lefebvre-Linetzky

« Nous ne verrions jamais aucun paysage nouveau, si nous n’avions, avec nos yeux, le moyen de surprendre, d’interroger et de mettre en forme des configurations d’espace et de couleur jamais vues jusque-là. »

Armand Scholtès





Image empruntée ici


S’il est un peintre qui invite à la promenade, c’est bien Armand Scholtès, peintre lorrain installé sur la Côte d’Azur depuis 1986.  Cela fait cinquante ans qu’il peint, qu’il dessine. Son œuvre foisonnante est d’une variété qui ne cesse d’étonner. Il affectionne les séries, il passe avec aisance d’une peinture monumentale au dessin le plus minimaliste. Il aime se promener le long du rivage, émerveillé par la beauté du paysage. Il est fasciné par l’organisation parfaite des rochers qui surplombent la mer, il se passionne pour les anfractuosités et il s’interroge sur la présence de touffes d’herbes dans cet univers aride. De ses doigts, il cadre ce qui attire son regard, il engrange des images, des lignes, des formes et des sensations. C’est un arpenteur au regard aiguisé et à la mémoire vive. Ce travail d’observation se fait dans le recueillement afin de préparer et d’enrichir l’acte créatif. L’art d’Armand Scholtès est un art de l’épure, de la construction et de l’équilibre. Dessin après dessin, il établit une cartographie de son imaginaire et il nous invite à partager ses émerveillements. Ses dessins et autres aquarelles sont traversés de vibrations secrètes. Sur les feuilles, des fissures se dessinent en une sorte de labyrinthe sans cesse recommencé. Le tracé des lignes est parfois hésitant, comme si l’artiste retenait son souffle devant la beauté du monde. L’œuvre palpite d’une sensualité à la fois primitive et élaborée. Armand Scholtès est un visionnaire qui « donne » à voir.

Jacques Lefebvre-Linetzky (mai 2015)




Image empruntée ici 

Si vous désirez prolonger cette promenade, il vous suffit de vous rendre sur le site d’Armand Scholtès et de cliquer ici .


Le regard du philosophe sur le travail 
d’Armand Scholtès





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(…) la recherche d’Armand Scholtès consiste bien en un approfondissement du fondement des choses, en un recours à la permanence des étoffes, des plantes, de la terre et des pierres, c’est-à-dire aux éléments qui rendent possible un monde. Il est donc vrai que son art se situe « en amont » de leur particularisation dans des styles ou des modes de représentation des êtres et des choses. Il s’attache au bois, aux végétaux, ou encore aux pierres qui pourront être ensuite agencées, assemblées en structures d’un degré plus élevé de complexité, que ce soit par la nature elle-même ou par les hommes. Ainsi en est-il des enrochements de la Darse de Villefranche-sur-Mer qui captivent son regard. Finalement, il s’agit donc d’une « philosophie en acte », d’une pensée picturale qui ne peut se définir comme une simple réaction à un art déjà existant. Armand Scholtès recueille les éléments de la nature et du monde, les assemble, les transforme et dit : « voyez de quoi est fait un monde. »

Maurice Elie



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La galerie Joël Scholtès




© Jacques Lefebvre-Linetzky

Je me suis rendu récemment à la galerie Joël Scholtès à Nice. La galerie se situe dans un appartement. Il convient de prendre rendez-vous pour découvrir l’infinie variété de la production d’Armand Scholtès. Le concept est séduisant car le lieu est un espace de partage qui permet une relation intime avec l’œuvre de l’artiste.
Lors de ma visite, Joël accepté de répondre à quelques questions :




© Jacques Lefebvre-Linetzky

Quel est votre parcours ? Le domaine artistique vous a-t-il attiré dès votre plus tendre enfance ?

J’entretiens volontiers le souvenir de la grande maison de mon enfance, quasiment entièrement transformée en atelier par mon père. Ses créations, toiles, objets, tentures, tapisseries, installations d’éléments naturels rapportés de la forêt proche emplissaient chaque pièce. Je suivais au quotidien la réalisation des œuvres. J’aidais mon père à les manipuler, les installer dans la nature pour pouvoir les contempler au plus proche de leur source d’inspiration.
Je conserve aussi le souvenir de mes participations aux accrochages des expositions au Musée de Bar-le-Duc, ou à Metz, durant mon adolescence.
En 1986 nous quittons la Lorraine pour nous installer à Nice. Là encore mon père investit complètement l’intérieur de l’appartement que nous occupons à proximité du Musée des Beaux-Arts. Murs, plafonds, sols sont pris en charge, recouverts de fresques, tapis, le tout formant une œuvre totale. J’habitais une œuvre d’art.
Enfin mon père ouvre la galerie Racine, avec le soutien du propriétaire de la maison de confection textile Racine. Cela se passe au tout début de mes études et très vite pendant celles-ci je décide de créer une seconde galerie, rue Dalpozzo.

Quand avez-vous choisi de vous consacrer à la promotion l’œuvre de votre père, Armand ?

Je ne suis pas certain d’avoir choisi. Cela s’est imposé à moi, une obligation peut-être, transformée en évidence au fil du temps. Cette tâche n’est pas simple, bien entendu au regard de l’ampleur d’une telle mission, mais aussi de la complication de la relation père-fils qu’elle engendre. Suivant les périodes la relation est plus ou moins intense et prend le pas sur d’autres activités.

Pourquoi avoir opté pour un appartement-galerie ?

Après la première Galerie (Racine), puis celle rue Dalpozzo (Itinéraires), et des séjours prolongés à Paris et en Angleterre, je reviens à Nice en 2000 et ouvre presque aussitôt la Galerie Joël Scholtès qui sera active jusqu’en 2012. Et finalement après déjà presque 25 ans passés à l’activité plus ou moins principale selon les années de galeriste, je décide de fermer le lieu pour me consacrer prioritairement à la valorisation de l’œuvre de mon père. L’appartement-galerie est une bonne solution car il permet de travailler un peu en retrait et surtout sans obligation d’ouverture permanente au public.

Que peut-on voir dans votre galerie ?

Comme il y a des musées monographiques, c’est une galerie monographique. Après avoir présenté les œuvres de nombreux artistes, j’ai fait le choix ici d’accrocher uniquement les œuvres de mon père. Il faut dire que la richesse est au rendez-vous puisque sont présentées ici des œuvres des années 60 à nos jours, jusqu’aux dernières créations issues des recherches actuelles de mon père.

Toutes les œuvres présentées sont-elles à vendre ?

Presque toutes. Celles qui ne sont pas en vente font partie de séries anciennes dont il ne reste plus que quelques témoignages, et quelques autres auxquelles je suis particulièrement attaché pour diverses raisons.

Qu’en est-il des expositions consacrées à l’œuvre de votre père ? Quelles sont les plus récentes ? Je suppose que vous êtes directement impliqué.

Mon père ne s’implique plus autant qu’avant dans les expositions. C’est donc moi qui propose thématique et accrochage, en discussion avec mon père, puis qui participe aux accrochages. Ce fut le cas l’été dernier pour l’exposition qui s’est tenue au Musée de la Cour d’Or à Metz. Une installation d’œuvres dans une vingtaine de salles du Musée, au fil du parcours, en dialogue avec les pièces des collections permanentes, de l’archéologie aux Beaux-Arts.

Quelle est, à votre avis, la meilleure façon de se familiariser avec l’œuvre de votre père ? (expositions, monographies, dvd) ?

La plus directe est de venir regarder les œuvres dans l’appartement-galerie ou dans d’autres expositions. Et il est aussi possible de commencer ou de compléter l’approche par les publications et le site internet armandscholtes.com. Celui-ci est assez complet, conçu presque comme un catalogue raisonné de l’œuvre. Il est en cours de mise à jour et la refonte du graphisme et de la navigation seront achevés d’ici l’été.

Votre famille a un double ancrage – Moselle et Côte-d’Azur – est-ce que cela est sensible dans l’œuvre de votre père ?

L’implantation à Nice ne s’est pas faite aisément. Mon père a quitté une vaste maison, un environnement naturel proche propice, un tissu relationnel, etc.
L’une des transformations les plus significatives est le regard porté sur une nouvelle nature à déchiffrer : les collines, les montagnes, le vaste arrière-pays. Cela donne lieu à de nouvelles recherches, de nouvelles approches picturales et aussi au développement considérable de l’œuvre dessinée sur papier.

Vers quels autres artistes va votre sensibilité ?

J’ai présenté un nombre assez considérable d’artistes, au rythme d’une exposition par mois pendant une vingtaine d’années. Aujourd’hui je suis davantage tourné vers l’histoire de l’art et des créations plus anciennes, et la toute jeune génération pour ce qu’elle nous offre comme lecture de notre monde.

Que pensez-vous de la vente en ligne des œuvres d’art ? Est-ce une menace pour les galeristes ?

De nombreuses galeries utilisent la vente en ligne et s’approprient cet outil. C’est une chance pour elles de toucher un public plus vaste, plus lointain ou plus timide.

Vous avez récemment développé des activités de découvertes artistiques dans le cadre de l’association, Vu Pas vu. Pourriez-vous nous donner quelques détails à ce sujet ?

J’ai une relation privilégiée avec la création et l’art. Mon souhait à travers les activités de l’association Vu pas vu est de permettre le partage, les échanges au travers de rencontres, discussions, débats. Les projets se construisent à partir de mes propres désirs d’échanges ou de découvertes.



© Jacques Lefebvre-Linetzky


Contact : joel@galeriescholtes.com – marie@galeriescholtes.com – Tel: 06.14.60.11.12


Vu pas vu, à la rencontre des richesses culturelles et artistiques de Nice et de la Côte d’Azur.



© Jacques Lefebvre-Linetzky

C’est un beau projet que portent Joël et Marie Scholtès. Cette toute jeune association propose des conférences, des rencontres, des visites d’atelier et des parcours. Ces conférences, qui ont lieu à l’hôtel Negresco, sont des moments privilégiés où l’on peut déguster thé, café et viennoiseries avant d’écouter les savantes et subtiles analyses de Jean-Baptiste Pisano. Après Monet, Bonnard, Jean-Baptiste Pisano vous convie à découvrir l’œuvre d’Henri Matisse le 16 mai prochain, « entre intimité et ouverture, l’espace pictural matissien ». Le 20 juin, il abordera la peinture de Nicolas de Staël, « Nicolas de Staël, l’empreinte du vertige ».
Ne manquez pas ces rendez-vous, c’est un régal !



Joël Scholtès et Jean-Baptiste Pisano lors de la conférence consacrée à Pierre Bonnard
© Jacques Lefebvre-Linetzky


Le site de l’association vous donnera toutes les informations utiles, nécessaires, voire indispensables, il suffit de cliquer ici

Le mystère de l’œuvre

« Comment vous approcher concrètement du mystère de l’œuvre ? Paradoxalement en ne la réduisant pas à une devinette. Son mystère n’est pas ce qu’elle désigne : le mystère c’est plutôt ce qu’elle est. À nous de savoir prendre ce mystère au sérieux. C’est son être même, sa pure présence qui fait mystère. »


Benjamin Orcajada, Voir et savoir. De la peinture à la philosophie : Essai d’esthétique.

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