UTILE À SAVOIR


Ce blog est alimenté par Jacques Lefebvre-Linetzky. Commentaires et retours bienvenus.


mardi 6 décembre 2016

TURNER, THE SLAVE SHIP, UN TABLEAU DONT ON NE SORT PAS INDEMNE...


The Slave Ship, Joseph Mallord William Turner, 1840
Image empruntée ici

C’est une image énigmatique, fascinante, obsédante. C’est un tableau dont on ne perçoit pas le sujet d’emblée. Tout y est couleur et mouvement, fracas et tempête. On cherche en vain la ligne d’horizon ; l’œil se perd dans cette vision disloquée. Un éclair scinde le tableau en deux parties égales, cette fissure de lumière n’a rien d’apaisant. L’eau et le ciel se confondent. Sur la gauche, un navire est menacé par une vague déferlante qui s’apprête à fondre sur l’espace entier du tableau. Le premier plan est une image d’apocalypse. Des créatures mythologiques surgissent au creux des vagues, des corps mutilés jaillissent avant de sombrer dans les profondeurs. Une main se dresse, une jambe noire encore enchaînée est emportée dans ce tourbillon de couleurs.

lundi 27 juin 2016

LA MISE EN SCÈNE DU PORTRAIT: LAURA, UN FILM EMBLÉMATIQUE, UN THÈME HOLLYWOODIEN

Une fascination toujours renouvelée 


Image empruntée ici

D’où vient la fascination exercée par ce film au scénario improbable ? Comment se fait-il que qu’on se laisse « embarquer » comme au premier jour au point de feindre de ne pas connaître l’intrigue afin de se laisser surprendre, une fois de plus ?

Jeux de lumières, musique lancinante, dialogues affûtés, voix-off en contre point dont le timbre accompagne et enveloppe le dédale d’un récit emboîté, présence à la fois sensuelle et distante de la star aux yeux d’émeraude (Gene Tierney), regard du portrait de cette même star au centre d’une mise en abyme vertigineuse, intrigue policière dont on perçoit qu’elle n’est qu’un leurre car l’invraisemblable vérité se situe ailleurs…

jeudi 2 juin 2016

FILMER LE GESTE DU PEINTRE

L’artiste au travail



Caspar David Friedrich dans son atelier (1819)
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Lorsque le peintre se met en scène dans son atelier, il effectue un arrêt sur image, il met le temps entre parenthèses. Il est l’objet premier de la représentation dans une tentative effrénée de saisir au vol le geste de la création. Deux moments particulièrement intenses s’imposent alors à l’artiste. Celui du commencement où la main s’apprête à laisser la toute première trace et celui de l’achèvement où il se met à distance afin de se conforter dans l’idée qu’il n’y a plus rien à faire, plus rien à ajouter. Le geste de trop pourrait à jamais ruiner ses efforts.

Le champ de la photographie



© Lucien Clergue
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La photographie s’est tout d’abord attachée à saisir une posture dans une mise en scène souvent artificielle. L’artiste prend la pose, se contemple dans le miroir de la photographie qui n’a pas encore été développée. Souvent, l’environnement dans lequel il est photographié nous révèle une partie secrète de lui-même. Cela se fait presque à son corps défendant. Les progrès de la technologie ont permis aux appareils photographiques d’être plus légers, plus discrets, plus rapides. Pour saisir le geste, le photographe doit s’effacer, ne plus exister. Certains peintres en profitent pour investir le champ propre au photographe. Francis Bacon ou Picasso dévorent littéralement l’objectif et s’affranchissent de l’emprise du photographe. Ce regard direct, qui s’apparente à celui d’un prédateur, est dérangeant à maints égards pour le « regardeur » qui tente, par la suite, d’en percer le mystère.

mercredi 27 avril 2016

LE GESTE DU PEINTRE


Le geste de la création est une énigme et un défi. Au commencement il n’y a rien et puis l’œuvre semble surgir d’elle-même. Qui, de la main ou de l’esprit, organise cette mise en scène de lignes, de matières et de masses lumineuses ? L’artiste est un alchimiste, un voyant qui transforme le monde et le rend compréhensible.


La main, le regard, la mémoire du regard


Mains positives, La grotte Chauvet
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À l’aube des temps, il y a la main, la trace déposée sur les parois des grottes. Geste simple, geste primitif de l’histoire des hommes que les enfants perpétuent au gré de leur fantaisie. Sur les parois des grottes fleurissent des mains positives – la main enduite de couleur est apposée directement sur la paroi, et des mains négatives - la couleur est déposée autour de la main. Plus rarement, des mains ont été gravées. La main est l’outil de nos origines.



Mains négatives, La grotte Chauvet
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mardi 1 mars 2016

NIGHTHAWKS, L'ART DU SILENCE SELON EDWARD HOPPER







Une exposition à la Tate Modern à Londres



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Il y a quelques années, il m’a été donné de voir des tableaux d’Edward Hopper pour de « vrai ». C’était à la Tate Modern à Londres. C’est un édifice imposant, une ancienne usine électrique, une sorte de loft titanesque, un dédale de murs de briques et de poutres métalliques, un enchevêtrement savant de coursives et d’escaliers. Je me souviens avoir retenu mon souffle avant même de contempler ces tableaux si familiers.

J’étais dans l’attente, figé dans l’expectative, comme pour retarder le moment de la découverte. De Hopper, je n’avais vu que des reproductions dans des livres d’art. Comme tout le monde, je collectionnais des cartes postales de ses œuvres les plus populaires et elles me servaient de marque-pages. J’ai donc marqué le pas avant d’ouvrir les yeux, totalement absorbé par le pouvoir hypnotique de ces images d’une luminosité vibrante et mystérieuse.

Ce fut une expérience rare, une émotion souterraine et persistante suscitée par la densité du regard du peintre. La peinture de Hopper laisse une trace, elle vous accompagne et s’installe dans le temps ;  elle se love au creux de l’âme, elle frémit, elle palpite à la surface de la toile.

lundi 4 janvier 2016

ALAIN KLEINMANN, LES COULEURS DE LA MÉMOIRE





Alain Kleinmann, 
Somogy, Éditions d'Art, 2014.

Un lourd volume m'accompagne depuis quelque temps, gentiment prêté à moi par une amie. C'est une somme, le travail d'une vie, le parcours d'un artiste généreux et chaleureux. Toujours en chemin, il continue à modeler la matière , à pétrir les images de la mémoire à demi effacée. L'ouvrage, qui compte plus de 580 pages, ne comporte pas de titre. Le titre, c'est le nom de l'artiste, Alain Kleinmann. Il a exposé dans des galeries prestigieuses partout de par le monde ; son travail a été salué par des écrivains et des artistes de renom tels que Louis Aragon, Elie Wiesel, Marcel Marceau, Georges Moustaki, Vladimir Jankélévitch, entre autres...
Cet ouvrage a des allures de catalogue raisonné pas tout à fait raisonnable en raison de sa taille, du foisonnement des images et de la somptueuse richesse des émotions qu'il suscite. 



Hanna, Alain Kleinmann, 
Somogy, Éditions d'Art, 2014, p. 116.