UTILE À SAVOIR


Ce blog est alimenté par Jacques Lefebvre-Linetzky. Commentaires et retours bienvenus.


mercredi 27 avril 2016

LE GESTE DU PEINTRE


Le geste de la création est une énigme et un défi. Au commencement il n’y a rien et puis l’œuvre semble surgir d’elle-même. Qui, de la main ou de l’esprit, organise cette mise en scène de lignes, de matières et de masses lumineuses ? L’artiste est un alchimiste, un voyant qui transforme le monde et le rend compréhensible.


La main, le regard, la mémoire du regard


Mains positives, La grotte Chauvet
Image empruntée ici

À l’aube des temps, il y a la main, la trace déposée sur les parois des grottes. Geste simple, geste primitif de l’histoire des hommes que les enfants perpétuent au gré de leur fantaisie. Sur les parois des grottes fleurissent des mains positives – la main enduite de couleur est apposée directement sur la paroi, et des mains négatives - la couleur est déposée autour de la main. Plus rarement, des mains ont été gravées. La main est l’outil de nos origines.



Mains négatives, La grotte Chauvet
Image empruntée ici

mardi 1 mars 2016

NIGHTHAWKS, L'ART DU SILENCE SELON EDWARD HOPPER







Une exposition à la Tate Modern à Londres



Image empruntée ici

Il y a quelques années, il m’a été donné de voir des tableaux d’Edward Hopper pour de « vrai ». C’était à la Tate Modern à Londres. C’est un édifice imposant, une ancienne usine électrique, une sorte de loft titanesque, un dédale de murs de briques et de poutres métalliques, un enchevêtrement savant de coursives et d’escaliers. Je me souviens avoir retenu mon souffle avant même de contempler ces tableaux si familiers.

J’étais dans l’attente, figé dans l’expectative, comme pour retarder le moment de la découverte. De Hopper, je n’avais vu que des reproductions dans des livres d’art. Comme tout le monde, je collectionnais des cartes postales de ses œuvres les plus populaires et elles me servaient de marque-pages. J’ai donc marqué le pas avant d’ouvrir les yeux, totalement absorbé par le pouvoir hypnotique de ces images d’une luminosité vibrante et mystérieuse.

Ce fut une expérience rare, une émotion souterraine et persistante suscitée par la densité du regard du peintre. La peinture de Hopper laisse une trace, elle vous accompagne et s’installe dans le temps ;  elle se love au creux de l’âme, elle frémit, elle palpite à la surface de la toile.

lundi 4 janvier 2016

ALAIN KLEINMANN, LES COULEURS DE LA MÉMOIRE





Alain Kleinmann, 
Somogy, Éditions d'Art, 2014.

Un lourd volume m'accompagne depuis quelque temps, gentiment prêté à moi par une amie. C'est une somme, le travail d'une vie, le parcours d'un artiste généreux et chaleureux. Toujours en chemin, il continue à modeler la matière , à pétrir les images de la mémoire à demi effacée. L'ouvrage, qui compte plus de 580 pages, ne comporte pas de titre. Le titre, c'est le nom de l'artiste, Alain Kleinmann. Il a exposé dans des galeries prestigieuses partout de par le monde ; son travail a été salué par des écrivains et des artistes de renom tels que Louis Aragon, Elie Wiesel, Marcel Marceau, Georges Moustaki, Vladimir Jankélévitch, entre autres...
Cet ouvrage a des allures de catalogue raisonné pas tout à fait raisonnable en raison de sa taille, du foisonnement des images et de la somptueuse richesse des émotions qu'il suscite. 



Hanna, Alain Kleinmann, 
Somogy, Éditions d'Art, 2014, p. 116.

mardi 20 octobre 2015

RAYMOND SANTORO, ALL KINDS OF BLUES ...


Les bleus hypnotiques 



Ma première rencontre avec Raymond Santoro eut lieu à la Librairie-Galerie Rabelais, située rue Défly à Nice, lors d’un vernissage où il exposait son travail aux côtés de Paul Conte. C’était une exposition de grands formats – les cortèges de Paul défilaient, accrochés aux cimaises, tandis que les toiles de Raymond, habillées de bleu et ornées de mystérieux astres colorés, faisaient danser des personnages qui semblaient s’être échappés de quelque fresque grecque ou romaine. La somptuosité baroque de la peinture de Paul faisait vibrer la densité des bleus hypnotiques des tableaux de Raymond.
Je me suis approché de Raymond et nous avons devisé, comme souvent en pareille occasion. Il a un bel accent niçois, il m’a parlé de son travail et il m’a invité à lui rendre visite dans son atelier. Je m’y suis rendu quelques mois plus tard.

Une subtile rhapsodie



mardi 15 septembre 2015

LA CARESSE DU CRAYON


Epurer le réel, © JL+L


Quand j'étais petit… 

Septembre sonne la rentrée et je suis retourné à mes crayons. J’ai toujours aimé la tendresse du crayon. Quand j’étais petit, on l’appelait « le crayon à papier » et plus tard, ce fut « le crayon gris ». Je me souviens des dessins maladroits que je logeais entre deux cahiers cornés dans mon cartable encombré. Il m’arrivait aussi de dessiner sur une ardoise. Un dessin me revient en mémoire, un portrait d’Henri IV d’après une gravure qui figurait dans mon livre d’Histoire. C’était très réussi et j’en étais fier. Malheureusement, il s’effaça dans le fatras que contenait le cartable mentionné plus haut. Je me dis que c’est l’effacement qui me le rendit si précieux.  Il est temps pour moi de revenir au crayon et de quitter le passé pas si simple que ça.

L’outil

Fait de mine et de bois, c’est l’outil "bipolaire" par excellence. Il peut être dur, moyennement tendre ou d’une tendresse infinie. Il se décline en lettres et en chiffres et celui que je préfère, c’est le HB. C’est la mine à tout faire, la bonne mine en quelque sorte. Il faut savoir l’apprivoiser.

lundi 4 mai 2015

ARMAND ET JOËL SCHOLTÈS, L'ARPENTEUR ET LE GARDIEN




© Jacques Lefebvre-Linetzky

« Nous ne verrions jamais aucun paysage nouveau, si nous n’avions, avec nos yeux, le moyen de surprendre, d’interroger et de mettre en forme des configurations d’espace et de couleur jamais vues jusque-là. »

Armand Scholtès





Image empruntée ici


S’il est un peintre qui invite à la promenade, c’est bien Armand Scholtès, peintre lorrain installé sur la Côte d’Azur depuis 1986.  Cela fait cinquante ans qu’il peint, qu’il dessine. Son œuvre foisonnante est d’une variété qui ne cesse d’étonner. Il affectionne les séries, il passe avec aisance d’une peinture monumentale au dessin le plus minimaliste. Il aime se promener le long du rivage, émerveillé par la beauté du paysage. Il est fasciné par l’organisation parfaite des rochers qui surplombent la mer, il se passionne pour les anfractuosités et il s’interroge sur la présence de touffes d’herbes dans cet univers aride. De ses doigts, il cadre ce qui attire son regard, il engrange des images, des lignes, des formes et des sensations. C’est un arpenteur au regard aiguisé et à la mémoire vive. Ce travail d’observation se fait dans le recueillement afin de préparer et d’enrichir l’acte créatif. L’art d’Armand Scholtès est un art de l’épure, de la construction et de l’équilibre. Dessin après dessin, il établit une cartographie de son imaginaire et il nous invite à partager ses émerveillements. Ses dessins et autres aquarelles sont traversés de vibrations secrètes. Sur les feuilles, des fissures se dessinent en une sorte de labyrinthe sans cesse recommencé. Le tracé des lignes est parfois hésitant, comme si l’artiste retenait son souffle devant la beauté du monde. L’œuvre palpite d’une sensualité à la fois primitive et élaborée. Armand Scholtès est un visionnaire qui « donne » à voir.

Jacques Lefebvre-Linetzky (mai 2015)

lundi 6 avril 2015

LULI S'EMBALLE ET NOUS EMBALLE




La photographie ne reproduit pas le visible, elle rend visible, Richard Avedon (1923-2004)


Depuis le 24 mars dernier et jusqu’au 3 mai 2015, Luli Barzman expose ses images « tapisseries » et nous invite à découvrir de mystérieux agencements de couleurs et de textures glanés lors de trois voyages à Marrakech. La thématique retenue est celle de l’emballage – tissus, bâches, cartons, plastiques sont autant de drapés qui habillent un quotidien transfiguré par la magie du regard de l’artiste. Ses photographies hybrides, qu’elle préfère appeler des images, nous plongent dans un monde intensément poétique.



Photo JL+L

Cette invitation au voyage est d’autant plus « emballante » qu’on la découvre dans un lieu inhabituel, une ancienne chapelle construite au XVIIe siècle et désormais désaffectée au culte. Pour y accéder, il faut suivre un dédale de rues, gravir un escalier, passer de l’ombre à la lumière et s’imprégner des charmes du Vieux Nice.

Depuis 2001, l’Association La Semeuse y mène des actions culturelles et artistiques accessibles au plus grand monde. Le Centre culturel de la Providence, c’est ainsi qu’il se nomme, propose des cours de musique, d’arts plastiques et organise régulièrement des spectacles, des concerts, des expositions et des rencontres. C’est aussi un lieu de résidence artistique qui accueille l’Ensemble de la Société de Musique Ancienne de Nice et la compagnie de théâtre BAL.

Centre culturel de la Providence, 8 bis, rue Saint-Augustin, 06300 Nice.
Pour plus d’information voir site : http://www.lasemeuse.asso.fr